Le Monde: Delanoë veut Free, il a rien compris (7)

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Les Verts veulent ralentir l'arrivée de Free mobile à Paris

 

Les Verts et plusieurs associations veulent relancer le débat sur l'installation des antennes-relais de téléphonie mobile à Paris. L'arrivée prochaine d'un quatrième opérateur, Free, au côté de Bouygues, Orange et SFR, leur en fournit l'occasion.

En effet, le Conseil de Paris doit se prononcer, lundi 27 ou mardi 28 septembre, sur une délibération visant à permettre à Free de déployer son réseau sur les toits des bâtiments administratifs et sur certains édifices publics. Cela représenterait trente à quarante antennes, selon la Mairie de Paris, situées sur des points hauts de la capitale. Il faut en ajouter, selon les opposants à ces installations, deux cent cinquante qui seraient installées sur des immeubles appartenant au domaine privé.

 BAUPIN DANS UNE SITUATION INCONFORTABLE

Cette délibération souligne que "Free mobile a sollicité la Ville de Paris, en sa qualité de propriétaire des points hauts afin de bénéficier d'un accès à son domaine public, dans des conditions comparables à celles consenties à ses concurrents". Depuis que la quatrième licence de téléphonie mobile lui a été accordée, l'un des impératifs de ce nouvel opérateur est de "couvrir 27 % de la population métroplitaine par le service de la voix dans les deux ans suivant la délivrance de l'autorisation". Celle-ci lui a été attribuée en décembre 2009, mais des contentieux sont en cours devant le Conseil d'Etat et les instances européennes.

Composante de la majorité de gauche du conseil de Paris, les Verts entendent se rappeler au bon souvenir de Bertrand Delanoë, le maire PS de la capitale, sur ce dossier d'installation de nouvelles antennes par Free – dont le fondateur, Xavier Niel, fait partie d'un trio d'investisseurs devenu actionnaire majoritaire dans le groupe Le Monde. Ils sont accompagnés dans leur opposition par le syndicat d'employés municipaux Supap-FSU et par plusieurs associations : Robin des toits, Agir pour l'environnement et Priatem (Pour une réglementation des implantations d'antennes-relais de téléphonie mobile).

Les opposants reprochent à la Ville d'ignorer les préconisations de la conférence des citoyens baptisée "Ondes, santé et société", que M. Delanoë avait mise en place. Celle-ci a rendu ses conclusions en juin 2009, mais elles restent "lettre morte", note Jacques Boutault, maire écologiste du 2e arrondissement. Bernard Pieri, du Supap-FSU, est catégorique : "Avant d'autoriser un quatrième opérateur à déployer de nouvelles antennes, il faut mettre en œuvre une nouvelle charte s'appuyant sur les mesures préconisées par cette conférence, en particulier la mutualisation des antennes, l'implantation de micro-antennes moins puissantes et la révision à la baisse du seuil d'exposition."

"L'IRRESPONSABILITÉ" DE L'ÉTAT 

La Mairie rétorque qu'elle n'a pas de marge de manœuvre. "Si la Ville ne passait pas cette délibération, elle serait condamnée immédiatement" en vertu du principe de non-discrimination entre les opérateurs. Un argument que ne réfute pas Denis Baupin, adjoint (Verts) chargé de l'environnement, en soulignant que, sur cette question, "les collectivités territoriales sont dépourvues de l'essentiel des compétences qui sont entre les mains de l'Etat", dont il regrette "l'irresponsabilité" en la matière.

Coincé entre deux adjoints socialistes – Bernard Gaudillère (finances) et Jean-Louis Missika (innovation) – qui suivent le dossier avec lui sous la responsabilité d'Anne Hidalgo, première adjointe (PS) au maire, M. Baupin est dans une situation peu confortable. Il ne mène pas une campagne frontale, préférant parler de "désaccord tactique entre les Verts et le reste de la majorité municipale".

 

Le maire (PS) de Paris, Bertrand Delanoë.
Nabil Wakim/Le Monde.fr
Le maire (PS) de Paris, Bertrand Delanoë.

 

Tout donne à penser que M. Baupin se place en médiateur entre ses amis écologistes les plus intransigeants – "Je ne sais pas si ces antennes sont dangereuses et je ne sais pas si elles ne le sont pas", dit-il et M. Delanoë, à qui il reproche sa "précipitation". Avec une pointe d'ironie, il souligne la contradiction dans laquelle va se trouver l'opposition de droite : dans le 16e arrondissement, un moratoire a été adopté sur l'installation de nouvelles antennes.

In fine, il n'est pas impossible que Free fasse les frais de ce duel politique à fleurets mouchetés. Les écologistes ne cachent pas qu'ils veulent pousser la municipalité à "établir un rapport de force" avec le nouvel opérateur. En espérant, secrètement, que les trois autres ne viennent pas à son secours. "Free va se rendre compte que les Parisiens en ont marre d'être les cobayes de la téléphonie mobile", confie M. Baupin. L'opérateur en question, de son côté, ne souhaite pas faire de commentaire.

Olivier Biffaud

Publié dans wifi

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